Commissaire à ... Ales
C'était quelques jours avant Noêl, lors de l'Assemblée Générale de mon club , le trial Club de la Burle à Colombier le Vieux (Ardèche), j'avais du abandonner la réunion un petit peu avant la fin.
Fallait pas, car après mon départ, notre cher et vénéré chef ( Christian Demonteil) lisait un courrier de l'organisateur du championnat du Monde qui demandait à notre club de bien vouloir leur fournir 5 commissaires.
Il y a bien plus de soixante-dix adhérants au club, mais les mains n'étaient pas nombreuses à se lever.
Faut dire que la responsabilité de tenir une zone de Mondial , fait un peu peur, et l'idée d'être devant 5000 personnes et très souvent d'excellents connaisseurs de notre discipline, vous inquiète un peu. Quand tu te plantes en ligue,tu t'en fous , en championnat du Monde; j'ai vu des commissaires se faire huer .
Bref mon copain Dédé qui avait lui levé le doigt, devant le manque cruel d'un cinquième commissaire faisait proposer mon nom devant 70 membres tous d'accord avec ce judicieux choix.
Mon Dédé, à charge de revanche !, et la revanche est venue dès la réunion suivante à laquelle mon Dédé n'avait pas pu assister, quand notre chef à tous nous demanda de déterminer pour Ales un chef de zone,il est bien évident que je proposais mon pote André pour ce rôle si délicat (c'est lui qui a toute la responsabilité de la zone)
Moralité à la Burle vaut mieux assister aux réunions !
Non je rigole il est bien évident que si j'avais pas voulu… et puis m'est venu l'idée de vous raconter notre GP de France vu du côté d'un commissaire de zone.
Quelques semaines, avant l'épreuve , nous avons reçu de l'organisateur le programme des commissaires .
Convoqués pour 21 heures, quatre d'entre nous descendons tranquillement en moto ( de route) vers Ales.
Arrivés sur place, nous faisons le tour du parc coureur en commençant par le camion Dherbey où nous retrouvons notre camarade de Club, Julien Arnaud, qui fort de sa belle quatrième place en junior à Andorre nous promet cette fois de battre Laia Sanz.
Marc Soulas, cinquième au provisoire du championnat Junior vient nous dire bonjour. Il y a vraiment une bonne ambiance entre tous les jeunes Français qui se battent comme des lions dans les zones mais qui restent vraiment copains après avant et après le trial.
Le parc coureur a vraiment de la gueule et les camions des pilotes de plus en plus beau.
Fujinami avec son camion noir et or et l'un des plus regardé . Pas mal non plus le camion Montesa où les machines sont alignées derrière une baie vitrée et les mécanos travaillent a l'abri des intempéries .
Direction la maison des commissaires où ce sont pas moins de 3 tee shirt et deux casquettes qui nous sont remis, tel tee shirt pour tel jour, tel autre pour le soir et le dernier pour le dimanche, la casquette du samedi, la casquette du Dimanche !!
Bon apéro,bonne bouffe , on se retrouve attablé avec des commissaires qui officiaient aux 4 jours de l'Aveyron et avec Bruno Camozzi qui était la depuis Mercredi pour donner des conseils techniques sur les zones. Bruno nous brieffe un peu sur les petites tricheries des pilotes, et il en connaît un rayon le bougre. Exemple, certains pilotes ont pris pour habitude de tirer la cravate au moment où le commissaire va poinçonner la cravate de façon à ce que la pince passe du un au zéro. Et le double pointage ? c'est le carton qui est considéré comme valable, pas le double pointage !
Autre type d'arnaque, les pilotes sont toujours a la recherche d'appels pour les aider à prendre les grosses marches, et ces appels ils les trouvent sous forme de pierres dans la zones, il est bien sur interdit de la prendre à la main, interdit oui mais essayer de passer outre est monnaie courante. Bruno cachait ses appels dans son dossard, toujours bien serré en bas et devant la zone il suffisait d'ouvrir le dossard au moment ou le commissaire regardait ailleurs…
Bref on a beaucoup appris, ce soir au contact de Bruno et des officiels qui nous rappelaient quelques régles.
Bon une bière et au lit rendez vous a 7h30 pour le petit déjeuner.

Petit dej , rebriefing et départ sur les zones la notre la 13 est en haut du circuit et pour la rejoindre on emprunte avé nos motos ( Ales c'est le midi) le magnifique circuit , pour quelques centaines de mètres on a l'impression d'être des pilotes de GP

Sur la zone vers les 9heures il n'y a plus qu'a attendre les clients qui devraient arriver vers 12h30 . En attendant on s'organise,d'abord visite de la zone très détaillée pour chacun des trois tracés ( vert = 125cc,bleu = juniors,rouge = experts ),on imagine tous les passages possibles, " et tu crois pas qu'il y en a qui vont essayer de passer par là ? "
On se reparti les tâches , André le chef de zone trône au milieu de la zone c'est lui qui a le sifflet pour notifier les échecs ,c'est lui qui a la lourde responsabilité de prendre la décision finale ( et pourquoi croyez vous que j'en voulais pas de ce rôle)
Joël a lui aussi un sifflet pour donner le départ et siffler au bout d'une minute trente si le pilote n'est pas sorti de la zone. Il devra aussi demander au pilote de leur montrer leur cravate afin de tenir a jour le panneau destiné a renseigner les spectateurs sur les positions de la course. Hélas bien qu'ils en ait l'obligation , bien peu de pilotes lui montreront leur cravate parce qu'ils sont toujours pressés et pour certains parce qu'ils ne veulent pas donner des informations a leurs adversaires.
Dédée pointera les cravates et marquera le double pointage en attendant impatiemment que Pierre vienne la remplacer , il n'arrivera qu'a 15 heures et Dédée va rater le marché d'Uzes !
Jean Marc et moi se partageons le début (moi) et la fin (jean marc) de la zone. Jean Marc aura dans les mains le panneau pour indiquer aux spectateurs le nombre de pieds posés par le pilote.
10h00 On a la visite de Bruno Camozzi qui commence par enlever tous les appels que se sont construit les pilotes en visitant la zone la veille, et nous conseille de bien suivre le petit manège des suiveurs pendant que les pilotes sont dans la zone , car ils profitent du fait que les commissaires suivent les évolutions du pilotes pour vite remonter des appels.
Consigne démonter les appels même si le pilote est rentré dans la zone.

14h J'échange de poste et prend la pince juste quand les premiers dossard rouges ( experts rentrent dans la zone ) la tension monte , il y a un peu plus de spectateurs , mais pas tant que ça , il faut dire que notre zone est une des plus éloignée du circuit et en plus elle est en plein soleil.
Pou moi le fait qu'il n'y ait pas 2000 spectateurs me convient tout a fait parce qu'il y a beaucoup de gens qui pensent connaître les règles mais qui n'ont pas une connaissance complète. Exemple a un moment un pilote qui vient de poser un pied a terre et alors qu'il est en train de ramener son pied sur le repose pied ,le moteur cale, il redémmare sa machine en équilibre et j'attend derrière moi des gens s'étonner que nous n'ayons pas mis un 5 a ce pilote,bien sur un pied a terre plus un calage c'est 5 mis là ce n'était pas le cas.
Avec les experts les quelques contestations prennent des allures tragicomiques .
Exemple un pilote Espagnol a la ramasse sur la dernière énorme marche dans la zone pédale et met trois pieds très légers et très rapidement pour se sortir d'affaire,j'ai le mauvaise idée de regarder mes collègues car j'ai un doute ,il me semble que le pilote a en plus reculé.
Le pilote voit dans mon regard l' indécision et se dit que c'est le moment de grappiller un point ou deux,et m'annonce dans un français approximatif mais plein de voix ,d'un ton affirmatif " Mossieur lé commissaire , j'ai un " , j'éclate de rire devant tant d'optimisme et je lui pointe son trois.
Nous avons du pointer bien sur quelques reculs et c'est vraiment là l'exercice le plus délicat,nous avons reçu quelques noms d'oiseaux, j'ai élargi mon vocabulaire Espagnol de jurons. J'ai même entendu un certain " fils de puta " destiné a mon chef de Zone et déclamé par une personne du genre féminin ! tout cela parce qu'en Espagne les Espagnols jugent les recul Espagnols pas tout de la même façon.
Certains top pilotes sont vraiment à la bourre et nous sommes tout étonné de les voir s'engager dans la zone sans l'avoir reconnue. Bien sur ils sont surplace depuis 2jours , et on largement eu le temps de repérer les zones, mais de là a s'y engager comme ça !
Les pilotes 125 arrivent pour faire leur deuxième tour , alors que les top sont encore là, inutile de vous dire qu'ils laissent leur place aux cadors dans l'entrée de zone.
Il faut rester vigilant pour chaque concurrent ,et ne pas se déconcentrer, aussi dés qu'il y a un trou entre deux pilotes un peu prolongé les vannes a deux balles fusent pour mieux baisser la tension qui se lit sur nos visages. Ah , on en a dit des connerie !
Mais dés qu'il un pilote qui rentre dans le corridor d'entrée , le chef de zone hurle : " commissaires prêts dans la zone ? " et tous les quatre lui répondons sur un ton tout aussi ferme " prêt dans la zone "
Cela a l'intérêt de se re concentrer et d'avertir plus ou moins les pilotes notre implication.
Un discours ferme du chef de zone, précis , expliquant ou ont été posé les pieds ou rappelant fermement les règles tempère vite les esprits .
J'ai entendu un pilote à la sortie d'une zone alors qu'il ne voulait pas admettre son échec dire a un de ses suiveurs en Espagnol " on conteste ? " et le suiveur de répondre " avec eux c'est pas la peine "
Le plus embêtant avec les top pilotes ce sont tous les accompagnateurs,suiveurs (dossards rouges) et autre mécaniciens (dossards noirs),sans compter les représentant des firmes (dossards verts) qui eux n'ont pas le droit de rentrer dans la zone mais qui ne se privent pas de le faire.
Et il faut souvent crier pour que tout le monde sorte de la zone quand un concurrent rentre dans cette zone.
Enfin le dernier Expert en finit avec notre zone et avec lui toute une nuée de spectateurs.
![]() |
![]() |
Il n'y aura pas de temps de repos , car déjà les juniors sont là et on enchaînera tout de suite avec le second tour des experts. Je suis mort et ne rêve que d'une bonne bière après les 5 ltres d'au que j'ai du boire dans la journée.
J'ai le regret de voir arriver Dougie Lampkin qui me demande de bien vouloir le pointer 5 car il n'est pas en état physiquement après sa lourde chute de faire les zones, dans son regard abattu se lit beaucoup de detresse.
Lendemain matin
![]() |
Rebriefing et changement de zone, nous est attribué la 12, celle là même sur la quelle il y a eu beaucoup de contestations et même quelques réclamations la veille.
Les organisateur avaient fait un tracé qui semblait logique,mais pour avoir une prise d'élan plus importante sur la dernière marche ,les pilotes ont déniché un moyen de redescendre dans la zone,seul problème s'ils prenaient leur virage trop loin ils coupaient une ligne fictive entre deux flèches vertes ( rappel de la règle : on ne peut passer entre deux flèches d'une catégorie inférieure) et qui dit ligne fictive dit appréciation personnelle… d'où longues et interminables discussion avec 2 pilotes .
Mais pas des pilotes du top 5 tout a fait prudent à la matière et qui préféraient rester 10 cms en dedans que de risquer prendre un 5 .
Pour les pilotes pas content la technique est de ne pas vouloir donner sa cravate, nous de notre côté on donnait l'explication , et on ne disait plus rien, moi j'attendais patiemment qu'a bout d'argument le pilote finisse par me donner son carton. Et pressé par le temps ils finissaient tous , par me donner leur carton.
Notre préféré en tant que star ,c'est Graham Jarvis , toujours très poli ,bonjour , merci , au revoir et surtout très fair play,il ne conteste jamais une décision.
Cette deuxième journée se passera très bien,mais sera épuisante,je pense que nous n'avons pas commis d'erreurs, en tout cas chaque fois que nous avons eu un doute nous avons donné l'avantage au pilote.
A ce niveau, il y a de l'argent en jeu pour les pilotes et on comprend la nervosité des pilotes,mais nous on se doit de faire abstraction de cela pour rester lucide.
La journée s'est terminé avec le rangement de la zone et une bonne douches, vous avez vu l'état des pieds ?!
jean finiels
![]() |